Lampedusa
Déjà ce drame survenu au large des Côtes de Lampedusa nous plonge tous dans la consternation. On devine la désespérance retournée en fol espoir qui a poussé ces gens dans les griffes de passeurs criminels, sur des embarcations de fortune, vers la mer ouverte comme un gouffre, dans la nuit, dans le froid, dans l’incertitude la plus totale.
Ces gens sont des gens comme nous. Nous aurions pu être à leur place. Nous aurions pu tenter l’impossible, nous jeter dans l’inconnu, jouer notre peau jusqu’au déraisonnable. Croire à notre étoile, s’accrocher à un mythe, ignorer la folie de l’entreprise. Nous aurions pu être de ceux qui n’ont plus rien à perdre, sinon leur vie, et qui la risquent. Qui sait du reste si cela ne nous arrivera pas un jour ?
On aimerait faire quelque chose, mais quoi ? Les accueillir ? Accueillir tous ceux qui souhaitent rejoindre l’Europe ? Mais nous ne nous en sortons pas, déjà dans notre société qui peine à assurer à tous logement, travail, santé, éducation. Elle est au bord d’un déséquilibre grave d’où peut surgir une crise violente à tout moment. Que pouvons-nous faire pour, avec, en faveur, de ces cohortes de candidats en partance pour l’Europe ?
Le cœur se serre. On s’en veut d’être si peu inventif. On en veut aux gouvernements du monde d’être si peu cohérents, compétents, efficaces pour engager des solutions sérieuses à l’échelle internationale. On se sent dépassé par le phénomène.
Alors si certains journalistes, intellos, parfois curés, et autres bien-pensants pouvaient éviter d’en rajouter sur notre soi-disant égoïsme, nos supposés manques de solidarité, de compassion…alors que nous ne savons déjà pas où donner de la tête, des sous, du temps, de l’attention, – les multiples associations actives dans la solidarité en sont une preuve – alors que nous nous sentons si impuissants malgré nos efforts, oui, si ces donneurs de leçons pouvaient mettre leur moralisme à deux balles en veilleuse, ça nous aiderait peut-être à réfléchir à de vraies et durables solutions.
Marie-Christine Bernard
Octobre 2013