Cours des miracles
« Comment ça se passe dans tes cours ? » « Je m’en sors ». Elle me dit qu’elle a appris à faire avec l’insolence banalisée d’élèves ingérables. « Si j’excluais de la classe chaque élève qui me répond « Ta g….. » quand je lui parle, je n’aurais plus personne en cours ». Elle m’apprend que sur 35 profs, 7 sont en arrêt maladie pour dépression… On imagine sans peine l’ambiance.
D’autres profs d’autres collèges, d’autres banlieues, ne disent pas autre chose. Leurs classes, de leur propre aveu, ne sont pas surchargées. Mais comment réagir devant un gaillard, même un seul, qui ne sait que faire de son mal-être et s’en protège à longueur de temps, par la violence verbale, symbolique, parfois physique, souvent machiste teintée de xénophobies multidirectionnelles (oui, le racisme anti-blanc, ça existe aussi !) ? Qui n’aime ni apprendre, ni rester assis, ni écouter ? Qui ne voit pas le sens de tous ces efforts qu’on lui demande, ces évaluations, cette discipline collective qui le pousse à s’en affranchir par tous les moyens ? Qui sait quoi faire avec un seul gaillard de 14-15 ans qui, de toute son énergie, de toute son immaturité, avec la force que donne le sentiment d’impunité, se sert de l’école comme d’une arène, d’un ring, d’une aire de jeux, ou d’une scène de spectacle ? Alors quand ils sont plusieurs, quand ils sont majoritaires, même si la classe n’était que de cinq élèves…
Qu’il y ait encore des profs qui tiennent debout dans ces cours…cours des miracles, assurément, voilà quelque chose qui force l’admiration.
Mais comment une nation peut-elle les laisser seuls à se débrouiller dans le contre-sens permanent qu’est de facto une telle situation ?
Marie-Christine Bernard
Juin 2013